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Quand les gouvernements se mettent à protéger les arts, c'est la fin de tout. C'est comme les fêtes organisées pour les soldats par les colonels et les dames de la Croix-Rouge : sauve qui peut.
Jean Dubuffet

jeudi 16 mars 2006

Las !

Je suis furieux, triste, j'enrage. Désormais, en matière de culture, ce n'est plus seulement le marché mais les industriels qui font la loi. Qu'est-ce qu'on peut faire pour lutter ? Ça me donne envie de me barrer. On n'a pas le droit d'inciter à la violence. Je hais la violence. Mais actuellement, c'est sur nous, citoyens d'un monde (encore) libre qu'on fait pleuvoir la violence de la dictature des industries. Révoltons-nous, putain !
PS : Pour un dossier complet sur la question, je vous suggère d'aller voir du côté de Rezo.net.
Allez voir aussi du côté de Framasoft.

Faire évoluer le droit d'auteur à l'heure des industries de la culture

Il est probablement déjà trop tard, mais...
Alors que le sommeil avait fui, il m'est venu une idée cette nuit, au sujet des droits d'auteurs. Je persiste à penser que le gouvernement vise à protéger l'industrie, et non les auteurs, qui bien souvent sont tenus de céder leurs droits à leur producteur. Aussi, une réforme en profondeur me semble nécessaire, pour favoriser, non seulement le reversement des droits aux auteurs eux-mêmes, mais aussi la promotion de la création en général – il s'agit ici plutôt de la musique, mais on peut probablement étendre l'idée.
L'idée qui m'est venue repose sur une comparaison avec ce qui existe en France au niveau de la création cinématographique. En effet, si la France est aujourd'hui le troisième pays producteur de cinéma au monde, après l'Inde et les Etats-Unis, cela tient en particulier à l'existence du CNC et à un principe original. Quel que soit le film, une partie du prix d'une place de cinéma est systématiquement reversée au CNC, afin de permettre le financement de productions ou co-productions françaises. Grâce à ce principe, le nombre de films fraçais qui ont pu être réalisés, mais également des co-productions avec des pays du monde entier, est colossal, et sans comparaison. Secondé par Unifrance, qui s'occupe de la promotion du cinéma français à l'international, ce système permet au cinéma français de rester une exception mondiale, et de générer une production encore vaillante – alors que ce qui existe ailleurs en Europe est plutôt indigent.
Par analogie, il me semble qu'un système de licence globale pourrait consister en ceci (et on pourrait encore imaginer que ce système s'applique également à la redevance sur les supports vierges). D'abord un prix plus élevé que celui initialement proposé (mettons, entre 10 et 15 euros), dont une partie serait reversée aux sociétés de droits d'auteurs, et l'autre à un organisme qui aurait pour vocation de favoriser la production d'artistes français. Il ne s'agirait pas de confier à un tel organisme un pouvoir d'autorisation d'exploitation, comme c'est le cas du CNC (aucun film ne peut être produit en France et diffusé dans les salles de cinéma sans passer par le CNC, qui dispense ses visas d'exploitation. Qu'un film comme Insurrection/Résurrection de Pierre Merejkovsky ait pu obtenir un tel visa tient à vrai dire du miracle), parce que cela risquerait de conduire à une supervision normative de la création. On pourrait imaginer que des demandes de financement émanent de maisons de production, mais surtout de la part d'artistes indépendants ou de petits labels. Il y a lieu d'imaginer ici à quel point un tel système permettrait d'ouvrir la création et de favoriser l'émergence de talents qui, dans l'état actuel, sont condamnés à n'avoir aucune audience, donc aucun producteur, faute de rentrer dans des cadres standards. Avec un tel système, l'autoproduction deviendrait bien plus accessible.
Et à la réflexion, je me dis qu'une telle redistribution pourrait s'appliquer également au prix des disques, dvd et autres. Vous achetez à la FNAC ou ailleurs (ailleurs, c'est mieux quand on peut) un cd de je ne sais pas quel groupe, qu'il soit français, américain, anglais ou afghan, et une partie, systématiquement, va à un fond de financement de la création. Il faudrait, bien sûr, qu'un tel système ne génère pas d'augmentation du prix du disque. Je sais, c'est idéaliste.
Avec un tel soutien à la création, je pense qu'on arriverait, comme pour le cinéma (même si la France commence, hélas, à se conformer à des codes américains en matière de producion cinématographique), à développer une création plus libre, et plus forte face à l'hégémonie mondiale des majors.
J'ai bien conscience de ne livrer ici qu'un principe général et sans doute utopique, dont les modalités d'application restent dans le vague. Mais il me semble que la réponse à l'industrialisation de la culture consiste à récupérer d'un côté la richesse et la diversité que cette industrialisation corsette de l'autre. S'il y a lieu d'adapter le principe des droits d'auteurs à la situation actuelle de la circulation des oeuvres, je crois qu'il s'agit, avant tout, de l'adapter à l'industrialisation de la culture, dont la circulation des oeuvres sur Internet ou les réseaux P2P n'est qu'un résultat. Et le soutien politique à la création me semble pour l'instant la meilleure des issues. Malheureusement, le gouvernement semble ne pas vouloir l'entendre de cette oreille.
Reste à savoir comment préciser cette idée, comment la diffuser et lui donner une pertinence qui permette un jour de la présenter comme une proposition réaliste qui pourrait faire l'objet d'un débat à l'Assemblée Nationale, par exemple... Commençons par en discuter ici ou là.